Nouveaux traitements dans le prurit

EADV 2019

Philippe Mauclet

Comme le rappelle Tom Hillary (UZ Leuven), le prurit est une plainte non seulement fréquente mais également souvent résistante au traitement. Le progrès des connaissances concernant sa physiopathologie font envisager de nouvelles stratégies thérapeutiques. Ces stratégies peuvent être séparés en deux groupes, selon qu’ils ciblent le système nerveux ou le système immunitaire. Tour d’horizon avec Jacek Szepietowski (Varsovie, Pologne).

NK-1, récepteurs aux opioïdes, TrkA et anti-H4
«Le groupe des agents ciblant le système nerveux comprend les inhibiteurs NK-1, les agonistes et antagonistes des récepteurs aux opioïdes, les antagonistes TrkA (Tromomycin receptor kinase) et les antagonistes des récepteurs H4», a précisé J. Szepietowski, avant d’évoquer les caractéristiques principales de ces différentes familles.

La substance P joue un rôle important dans l’induction du prurit, notamment par sa liaison aux récepteurs NK-1 sur les kératinocytes, ce qui a conduit au développement d’antagonistes NKR1. Les études concernant cette famille ont abouti à des conclusions un peu contrastées. Les résultats les plus favorables ont été observés avec le serlopitant. D’après les récentes recommandations des experts européens, les antagonistes des récepteurs NK-1 pourraient avoir une place en cas de prurit chronique ou de prurigo chronique réfractaire (1).

Le prurit pourrait également être intensifié par l’activation les récepteurs centraux aux opioïdes de type mu. La liaison des opioïdes kappa à leurs récepteurs aurait plutôt un effet inhibiteur sur le prurit. Des études montrent que les antagonistes des récepteurs mu, comme la naloxone, la naltrexone ou le nalméfène, peuvent diminuer de manière significative le prurit, notamment dans la cholestase, l’urticaire et la dermatite atopique. La nalfurafine, un agoniste des récepteurs kappa, a montré un effet favorable dans le prurit associé aux maladies rénales chroniques. La nalbuphine a un effet inhibiteur sur les récepteurs mu et un effet agoniste sur les récepteurs kappa. Elle a montré des résultats favorables en cas de prurit lié à l’urémie et dans le prurigo nodulaire. La difélikéfaline est également un agoniste des récepteurs kappa qui pourrait se révéler utile dans le prurit lié à l’urémie.

Le CT327 inhibe le domaine intracellulaire de Trk A (Tropomyosin-receptor kinase A). Il entrave de cette manière l’activité du NGF (Nerve Growth Factor) impliqué dans la pathogénie du prurit chronique. Le CT327 est évalué, en traitement topique, dans le psoriasis (2).

Enfin, le ZPL-3893787, un antagoniste des récepteurs à l’histamine H4, a été évalué dans une étude de phase II dans la dermatite atopique, étude dont les résultats montrent une supériorité significative de l’antihistaminique H4 par rapport au placebo pour les scores EASI, IGA et SCORAD, mais pas de différence pour le prurit (3).

PDE-4, Ig-E, cytokines et Janus kinase
Le deuxième groupe concerne donc les agents qui interfèrent avec le système immunitaire, en l’occurrence les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 4, les inhibiteurs des cytokines et les inhibiteurs de la Janus kinase.

Des données montrent que les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 4 sont utiles par voie orale, comme c’est le cas pour l’aprémilast dans le prurit lié au psoriasis (4), et par voie topique, comme pour le crisaborole dans la dermatite atopique (5).

Les biologiques font également partie des molécules ciblant l’immunité ayant montré une efficacité dans le prurit. Ce groupe comprend notamment l’omalizumab, un anti-IgE actif dans le traitement du prurit lié à l’urticaire chronique, ainsi que des inhibiteurs de cytokines, comme le dupilumab – qui est bénéfique dans le prurit lié à la dermatite atopique – le sécukinumab et l’ixékizumab, bénéfiques eux dans le prurit dû au psoriasis.

Enfin, les inhibiteurs de la Janus kinase, comme le tofacitinib – évalué dans le prurit associé à la dermatite atopique – complètent la liste des traitements, récents ou à venir, contre le prurit. «Une liste qui témoigne à quel point le prurit est préoccupant, tant pour les soignants que pour les patients, et qui devrait s’étoffer encore dans le futur», conclut J. Szepietowski

  1. Weisshar E et al. Acta Derm Venereol 2019;99:469–506
  2. Roblin D et al. Acta Derm Venereol 2015;95:542–8
  3. Werfel T et al. The Journal of Allergy and Clinical Immunology 2019;143:1830–7
  4. Strand V et al. Health and QoL Outcomes 2013;11:82
  5. Paller et al. J Am Acad Dermatol 2016;75:494-503

Vous souhaitez commenter cet article ?

L'accès à la totalité des fonctionnalités est réservé aux professionnels de la santé.

Si vous êtes un professionnel de la santé vous devez vous connecter ou vous inscrire gratuitement sur notre site pour accéder à la totalité de notre contenu.
Si vous êtes journaliste ou si vous souhaitez nous informer écrivez-nous à redaction@rmnet.be.